La dernière allumette - Marie Vareille
La dernière allumette - Marie Vareille
Depuis plus de vingt ans, Abigaëlle vit recluse dans un couvent en Bourgogne. Sa vie d’avant ? Elle l’a en grande partie oubliée. Elle est même incapable de se rappeler l’événement qui a fait basculer sa destinée et l’a poussée à se retirer du monde.
De loin, elle observe la vie parisienne de Gabriel, son grand frère, dont la brillante carrière d’artiste et l’imaginaire rempli de poésie sont encensés par la critique. Mais le jour où il rencontre la lumineuse Zoé et tombe sous son charme, Abigaëlle ne peut s’empêcher de trembler, car elle seule connaît vraiment son frère…
Pourquoi ai-je mis autant de temps à découvrir cette autrice ? Tout simplement que je la mettais dans le même panier que Virginie Grimaldi, allez savoir pourquoi, et étant donné que ce n'est pas une autrice que j'affectionne, j'avais peur d'être déçue une nouvelle fois. Mais ce fut tout l'inverse, ce sont bien deux styles, deux plumes, deux univers complétement différents, et Marie Vareille m'a conquise, surprise, happée, tout simplement séduite.
La construction de ce roman est très surprenante, à la fois dans son genre : contemporain, thriller psychologique, social, mais aussi dans sa construction : présent, passé, personnages différents. Ce roman m'a souvent dérouté, parfois mis mal à l'aise mais ce qui étrange, oh combien savoureux. Combien de questions me suis-je posée tout au long de ma lecture ? Des hommes et des femmes qui se croisent, s'aiment, se déchirent, se séduisent, se culpabilisent, s'entrechoquent, vivent, rêvent, cauchemardent, sur plusieurs années, à des endroits différents. Un roman riche en tout et d'une certaine façon m'a enrichi.
Abigaëlle, la forte et fragile à la fois, la peur de l'extérieur, la peur de son frère, le seul être qui lui reste, cette séparation douloureuse pour le bien de l'un et de l'autre, cette relation pleine d'amour et aussi conflictuelle, c'est la narratrice principale de ce roman. A la fois présente mais aussi tellement inaccessible, sa présence éthérée et pourtant omnisciente m'a retourné le cerveau. Sa vie, elle l'a vit par procuration pour se protéger et protéger, trouble de la mémoire, trouble du comportement, insaisissable, inaccessible, elle m'a terriblement touchée.
Gabriel, son frère lui aussi meurtri dans son enfance, l'ange protecteur de sa sœur, l'ange qui s'est coupé les ailes pour avoir les pieds bien ancrés dans le sol, l'ange aux deux visages, bienveillance et colère tournent, s'entrecroisent, s'emmêlent, entrent en conflit l'un l'autre. L'amour d'un frère pour sa sœur, l'amour d'un homme pour une femme, déchirement permanent du corps et de l'âme, c'est aussi un personnage, difficile à appréhender. Il m'a fait peur autant qu'il m'a rassuré. Sans doute restera-t-il le personnage le plus complexe jusqu'à la fin du roman.
Zoé, l'étincelle qui va mettre le feu au poudre, optimiste, rêveuse, amoureuse, rayonnante, sa vie est simple et elle aime simplement la vie. Elle sera l'élément déclencheur qui va faire basculer Abigaëlle et Gabriel. Jeu du chat et de la souris, je t'aime moi non plus, c'est un personnage qui apporte la lumière dans cette vie de souffrance physique et psychologique.
Ce roman est un roman qui parle de violence conjugale, de violence infantile, quand l'enfant est à l'âge de dessiner le monde plein de couleurs, seule la noirceur du monde existe. L'insouciance disparait, les émotions meurent, mais l'amour d'un enfant pour ses parents est toujours là... j'ai ressenti tellement de tristesse, de désarroi, de mélancolie. Marie Vareille a le pouvoir rare de transmettre des émotions qui débordent. Elle a construit son roman méthodiquement, ne laissant rien au hasard et pourtant, lorsque je l'ai lu, je n'ai jamais pu anticiper la mécanique de ce roman. Je me suis laissée porter tel un fétu de paille balayé par le vent de l'histoire, mes sens en alerte mais j'ai eu du mal à reprendre pied et ne pas me laisser emporter par cette histoire.
De nombreuse images resteront gravées dans ma tête sans en expliquer pourquoi celles ci ou bien celles là : une petite fille avec la plus belle chanson du monde dans ses oreilles, un homme avec un tatouage 3/4 sur le bras, un agenda ouvert avec le rdv de 17h30 du vendredi soir, des détails insignifiant chacun pris indépendamment, mais qui ensemble signifient tellement plus.
J'ai aimé ces femmes et ces hommes, leur douceur, leurs envies, leur féminité, leur masculinité, leur mystère, leurs désillusions, leur envie de faire le bien, leur envie de vivre, leur envie de protéger, leur bienveillance, leur courage, leur peur. Des hommes et des femmes dans le tourbillon de la vie qui tournent autour du même axe mais qui n'auront pas les mêmes séquelles. Une construction intéressante qui permet de s'immerger totalement dans l'histoire. Mon premier Marie Vareille mais pas mon dernier.
Très belle chronique sur ce roman que j'ai adoré aussi. Comme toi, j'ai certaines images qui me sont restées en tête.
RépondreSupprimerMerci beaucoup pour ce commentaire qui me touche. En as-tu lu d'autres ?
SupprimerDe cette autrice ? J'ai lu "Le syndrome du spaghetti", que j'ai aussi beaucoup aimé. Même si c'est une lecture un peu plus jeunesse, elle est superbe ! Et j'ai lu "Ainsi gèlent les bulles de savon" qui m'a un tout petit peu moins plu.
SupprimerJ'avais pensé à ainsi gèlent les bulles de savon mais il me tente un peu moins. Je verrai en fonction de ce que je trouve à droite à gauche. Mais merci pour ces précisions.
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