Les Larmes d’une Reine - C. W. Gortner
Les Larmes d’une Reine - C. W. Gortner
Si je ferme les yeux, je peux sentir la fumée et le jasmin, le feu et la rose ; je peux voir les murs de mon palais adoré. C'est là que tout a commencé, à la chute de Grenade.
Et donc ce soir, je vais témoigner du passé. Je vais coucher sur le papier tout ce que j'ai vu et vécu, tout ce que j'ai fait, tous les secrets que j'ai gardés. Je vais me souvenir, parce qu'une reine ne peut jamais oublier.
Une trahison qui a changé le cours de l'Histoire...
Fille d'Isabel de Castille et de Ferdinand d'Aragon, Juana est une femme gouvernée par ses passions. Son mariage arrangé avec Philippe le Beau commence comme un véritable conte de fées ; ils tombent amoureux au premier regard. Mais lorsque sa propre famille est tragiquement décimée, elle se retrouve, à l'âge de vingt-cinq ans, héritière du trône d'Espagne. Dès lors, Juana est au coeur d'une lutte d'ambitions sans pitié et sera même déclarée folle par les deux hommes de sa vie. Peu importe le prix à payer, Juana est prête à tout pour assurer l'avenir de l'Espagne et sa liberté.
Dans la famille Isabelle de Castille dite la Catholique et Ferdinand D'Aragon dit le Catholique, je demande cette fois-ci la troisième fille : Jeanne de Castille dite la Folle. La folle ! la folle ! oui ça arrangeait bien du monde de la prendre pour une folle mais l'était-elle vraiment ? Après avoir découvert la vie de sa jeune sœur Catherine d'Aragon à travers le roman La princesse d'Aragon de Philippa Gregory qui a écrit sur les épouses successives d'Henri VIII, je me suis laissée séduite par un autre auteur C. W. Gortner pour en découvrir plus sur Jeanne. Plusieurs références entre les deux sœurs sont présentes dans les deux romans, ce qui permet de faire le lien et j'ai pris plaisir à me remémorer certaines scènes. Mais une chose est sûre, dans les deux cas, des destins tracés dès leur naissance vont virer au drame.
Jeanne, fervente catholique vous vous en doutez, est une enfant espiègle, qui adore son père Ferdinand d'Aragon et moins sa mère la terrible Isabelle de Castille. Une enfance sur les champs de bataille, dans les palais Maures ou dans les châteaux espagnols, Jeanne est promise à l'archiduc d'Autriche Philippe dit le beau, meilleure alliance contre le royaume de France alors en guerre avec l'Espagne, elle quitte la chaleur de son pays pour rejoindre son fiancé. Quel chance croit-elle avoir de pouvoir épouser un homme jeune, fringant, instruit et fort beau. Dès que Jeanne pose les yeux sur Philippe, le mariage d'alliance devient mariage d'amour. Jeanne découvre une autre cour : celle des Pays-Bas et de la Belgique pour comprendre géographiquement où nous nous situons, car mes cours d'histoire datent un peu et j'avais du mal à situer les Etats bourguignons à la fin du XVème siècle. L'austérité de la cour d'Espagne est dissolue au profit de robes aux couleurs tapageuses, de danses collés serrés et autres débordements mettant en colère les chaperons espagnols ayant accompagné la princesse. Mais voilà, les apparences sont trompeuses, les voiles tombent, les paillettes laissent place à la noirceur de l'âme humaine assoiffée de pouvoir et d'influences.
Par des coups du sort favorables ou plutôt défavorables, Jeanne est destinée à régner sur la Castille car la seule encore en vie à pouvoir succéder à sa mère. Une femme, encore une femme !! Que nenni, que cela ne tienne, époux et/ou père vont tout faire pour discréditer cette jeune fille fatiguée par les complots, les séquestrations et les mauvais traitements que vont lui faire subir ses proches. Loin de ses propres enfants, abandonnée de tous, diffamée, rendue folle de tristesse, d'abnégation et de frustration, Jeanne va se battre contre le monde entier qui veut sa place. Le retournement de situation et surtout les sentiments de Jeanne envers ses parents sont extrêmement bien maitrisés.
Mère courage, épouse loyale, femme de cœur, sa destinée est d'être reine, alors Jeanne va se démener comme une folle pour avoir le titre royal qu'elle mérite, mais les trahisons successives, les mauvaises décisions vont la conduire à l'isolement.
C. W. Gortner propose un roman de fiction historique basé sur de nombreuses recherches qui est passionnant à découvrir. J'avais trouvé à plusieurs reprises des longueurs dans la Princesse d'Aragon, ce n'est pas du tout le cas ici. L'auteur prend soin de cette femme, la traite avec respect, honore ses décisions et ses échecs. Instruit son lecteur intelligemment, et lui fait remonter le temps pour prendre vie dans ce siècle qui laissera place au suivant et qui sera communément appelé le siècle de la Renaissance. Jeanne a-t-elle rené, c'est possible, mais pas comme elle aurait voulu renaitre, et loin d'être un Phoenix, elle s'est brulé les ailes.
Vous l'aurez compris, Jeanne n'a pas été épargnée et pourtant elle a cru aux paillettes qu'on lui a donné sans jamais touché l'or. La lutte est terriblement bien documenté, très bien romancé, une page de l'Histoire que je vous recommande.
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