Le portrait de Dorian Gray - Oscar Wilde

Auteur : Oscar Wilde
Éditions : Gloriana
Genre : Fantastique
Date de publication originale : 1890
Pages : 290

            " Un artiste est un créateur de belles choses."


Synopsis :

  - Ainsi tu crois qu'il y a seulement Dieu qui voit les âmes, Basil ? Ecarte le rideau et tu verras la mienne. Il avait, prononcé ces mots d'une voix dure et cruelle. - Tu es fou, Dorian, ou tu joues, murmura Hallward en fronçant les sourcils. - Tu ne veux pas ? Alors, je vais le faire moi-même, dit le jeune homme qui arracha le rideau de sa tringle et le jeta par terre. Une exclamation d'horreur s'échappa des lèvres du peintre lorsqu'il vit dans la faible lumière le visage hideux qui lui souriait sur la toile. Il y avait quelque chose dans son expression qui le remplit de dégoût et de répugnance. Grands dieux ! C'était le visage de Dorian Gray qu'il regardait ! L'horreur, quelle qu'elle fût, n'avait pas encore entièrement ravagé sa stupéfiante beauté. Il restait encore des reflets d'or dans la chevelure qui s'éclaircissait et un peu de rouge sur la bouche sensuelle. Les yeux bouffis avaient gardé quelque chose de la beauté de leur bleu. Le contour des narines et le modelé du cou n'avaient pas encore perdu complètement la noblesse de leurs courbes. C'était bien Dorian. Mais qui avait peint ce tableau ? Il lui semblait reconnaître son coup de pinceau. Quant au cadre, il était de lui. C'était une idée monstrueuse et pourtant il eut peur. Il prit la chandelle allumée et la tint devant le portrait, Son nom figurait dans le coin gauche, tracé en longues lettres d'un vermillon brillant.

Ce que j'en ai pensé :

 Quelle couverture !! Vous ne trouvez pas. Alors je ne vais pas vous mentir, ce n'est pas cette édition que j'ai lue puisque j'ai juste récupéré la version gratuite sur ma liseuse, mais je ne pouvais franchement pas passée à côté. Ce personnage est tellement LA BONNE représentation de ce qui peut être Dorian Gray. 

Dorian Gray, jeune homme de l'aristocratie londonienne à la fin du XIXème siècle évolue de cercles intimes en cercles intimes. Ah cette fameuse aristocratie qui ne travaillait pas réellement, dépensait sans compter l'argent de leurs proches parents, et déblatérait à longueur de journées et de nuits sur l'art, la beauté, la place de l'homme et de la femme, tout ça entourée par un nuage de fumée un verre à la main .

Nous découvrons ce personnage à travers les yeux de Basil Hallward, jeune peintre talentueux qui voit la beauté du corps de l'âme de ce jeune adolescent ,et décide de se l'approprier d'une certaine manière en réalisant son chef d'œuvre, une œuvre de plein pied qui montrera à jamais la beauté et la jeunesse. J'ai véritablement apprécié ce personnage fasciné par l'esthétisme du corps de son Appolon. Il en est fou, au point qu'il cherche à le cacher à son ami Lord Henry dit Harry. Basil incarne l'amoureux transit, un amour qu'il garde pour lui comme il garde sa douleur lorsqu'il offre la plus belle de ses pièces à son modèle. Cet amour n'est pas charnel, pas démonstratif, c'est seulement l'amour de la beauté, du ravissement des sens, de l'impossible, un amour platonique, mais pourtant va bruler ses doigts puisque jamais plus il ne peindra une œuvre équivalente.

Mais Basil n'est pas le seul qui va se bruler, Dorian lui même va se consumer de l'intérieur, lui l'adolescent qui ne connaissait pas le pouvoir de sa beauté va embrasser son image à travers les yeux de Basil et de Harry, s'aimant lui-même, aimant le beau, incapable d'aimer une femme car toujours il trouvera l'imperfection en l'être humain.

Le déclencheur de sa métamorphose psychologique est sa rencontre avec Harry, un peu dans le genre Harry, cet ami qui vous veut du bien. Non, ce personnage va insidieusement faire basculer Dorian du côté obscur et lui faire prendre le chemin pour lequel il était pas initialement prédestiné. Comme quoi une rencontre au hasard peut tout changer. Dorian va changer, mais pas son apparence, laissant le soin à son image artistique le soin de se déformer à sa place. Dorian ne vieillira plus, ne changera jamais d'apparence, sa beauté sera éternelle jusqu'à sombrer dans la folie.

Ce roman, classique dans le genre fantastique à l'égal de "La peau de chagrin" d'Honoré de Balzac, est sans aucun doute un texte pas facile à lire. Je le disais un peu plus haut, les déblatérations sur la beauté, l'art, l'esthétisme sont très souvent assommantes, l'amour des belles choses conduit les personnages à en parler pendant des heures et des heures nous perdant régulièrement dans un siècle qui n'est plus le notre. Les valeurs de la famille, de l'épouse, des amis, ne sont plus les mêmes qu'aujourd'hui, heureusement le temps fait son œuvre et "c'était le bon temps" n'est plus d'actualité. Mais voilà, on comprend l'emphase de ce siècle qui est passé où chaque mot était choisi, réfléchi et bien mis ajoutant indubitablement de la lourdeur au texte mais incontestablement le rend beau.

Et pourtant, Oscar Wilde met en avant dans ce texte des évidences qui m'ont fait régulièrement m'arrêter dans ma lecture pour partir moi-même dans mes propres réflexions : sur le passage des générations qui s'interroge comme depuis des siècles et des siècles sur l'amour, le vieillissement, la mort et la beauté.

Un livre que je n'ai pas particulièrement apprécié, mais qui reste cependant un classique du genre et je n'aurais pas aimé passé à côté.


Citations :

"Inconsciemment, il définit pour moi les lignes d'une école nouvelle, d'une école qui unirait la passion de l'esprit romantique à la perfection de l'esprit grec. L'harmonie du corps et de l'âme, quel rêve !... Nous, dans notre aveuglement, nous avons séparé ces deux choses et avons inventé un réalisme qui est vulgaire, une identité qui est vide ! Harry ! Ah ! Si vous pouviez savoir ce que m'est Dorian Gray !..."

"Le riche aurait parlé sur la nécessité de l'épargne, et le fainéant éloquemment vaticiné sur la dignité du travail…"

"La beauté est une des formes du Génie, la plus haute même, car elle n'a pas besoin d'être expliquée ; c'est un des faits absolus du monde, comme le soleil, le printemps, ou le reflet dans les eaux sombres de cette coquille d'argent que nous appelons la lune ; cela ne peut être discuté ; c'est une souveraineté de droit divin, elle fait des princes de ceux qui la possèdent… vous souriez ?..."

"La fidélité est à la vie sentimentale ce que la stabilité est à la vie intellectuelle, simplement un aveu d'impuissance."

"- Je sais ce que c'est que le plaisir ! cria Dorian Gray. C'est adorer quelqu'un.
- Cela vaut certainement mieux que d'être adoré. […] Etre adoré est un ennui. Les femmes nous traitent exactement comme l'Humanité traite ses dieux. Elles nous adorent, mais sont toujours à nous demander quelque chose."

"Quand une femme se remarie c'est qu'elle détestait son premier époux. Quand un homme se remarie, c'est qu'il adorait sa première femme. Les femmes cherchent leur bonheur, les hommes risquent le leur."

"Le drame de la vieillesse n'est pas qu'on est vieux, mais qu'on fût jeune."


Le mot de la fin :

Dorian, juste ce prénom qui roule dans la bouche en fait un adonis qui va peu a peu non pas rechercher la lumière, mais se bruler les ailes pour avoir un jour voulu garder beauté éternelle. Un livre faisant parti des classiques qui a malheureusement pris de nombreuses rides.

***
 

Commentaires

  1. C'est vrai que cette couverture est réussie :) Mais j'imaginaire Dorian Gray blond aux yeux bleus. Ah, cet amour de la beauté, on peut difficilement passer à côté. D'ailleurs, c'est le culte de l'esthétisme qui fait basculer Dorian. J'ai trouvé l'écriture lourde mais c'est logique car elle est d'un autre siècle. Il reste que j'ai apprécié quelques phrases assez corrosives. Il me semble l'avoir un peu plus apprécié que toi, mais sans doute parce que je suis contente d'avoir pu lire ce classique ; et même s'il est veiné d'inconvénient, je trouve l'idée originelle intéressante.

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    1. Sans doute l'aurais-je apprécié quelques années en arrière …
      Je ne sais pas, mais je suis aussi contente de m'être attardée sur ce classique.
      A bientôt.

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