Mangez-le si vous voulez - Jean Teulé

Auteur : Jean Teulé
Edition : Julliard
Genre : Historique
Sortie : 2009
Pages : 129

Synopsis :
Nul n'est à l'abri de l'abominable. Nous sommes tous capables du pire ! Le mardi 16 août 1870, Alain de Monéys, jeune périgourdin, sort du domicile de ses parents pour se rendre à la foire de Hautefaye, le village voisin. C'est un jeune homme plaisant, aimable et intelligent. Il compte acheter une génisse pour une voisine indigente et trouver un couvreur pour réparer le toit de la grange d un voisin sans ressources. Il veut également profiter de l'occasion pour promouvoir son projet d'assainissement des marais de la région.
Il arrive à quatorze heures à l'entrée de la foire. Deux heures plus tard, la foule devenue folle l'aura lynché, torturé, brûlé vif et même mangé. Comment une telle horreur est-elle possible ?
Avec une précision redoutable, Jean Teulé a reconstitué chaque étape de cet atroce chemin de croix qui constitue l'une des anecdotes les plus honteuses de l'Histoire du XIXe siècle en France.

Ce que j'en ai pensé :
Aussitôt ouvert, aussitôt lu, aussitôt refermé. Nous voici plongé à la fin du 19ème siècle dans un petit village du Périgord à côté d'Alain de Monéys. Nous allons vivre ces deux dernières heures.
Il fait chaud, très chaud, les récoltes ne sont pas bonnes et le peu qu'il y a est envoyé au front (nous sommes à l'époque où Napoléon III combat la Prusse), les gens sont malheureux : ils ont perdu un fils, un neveu lors de ces combats. Et surtout, à cette époque les gens sont illettrés seule 2 ou  3 personnes dans un petit village savent lire. Donc quand une personne est sollicitée pour lire les gros titres du journal et que cette personne annonce la défaite de la France lors de plusieurs batailles, il ne manque plus que l'allumette pour mettre le feu aux poudres.
Alain, jeune homme sympathique, amoureux de son pays, la France, légèrement bancal, décide de partir combattre même s'il a tiré le bon numéro pour initialement s'en abstenir. Alain est français et amoureux de ces terres, de sa famille, d'une jeune fille Anna, de son village, de sa région, de sa patrie. Il a même de grandes idées pour améliorer l'irrigation des terres des communes avoisinantes afin d'en améliorer le rendement pour aider ces voisins, ces amis, les paysans cultivant ces terres.
Mais voilà, Alain est là au mauvais endroit au mauvais moment. Comme un feu de brousse qui se propage, Alain va être l'allumette qui va l'allumer à ses dépens.
Lui français, il va être identifié comme prussien et toute la frustration, l'aigreur, la colère des gens qui l'entourent va se déverser sur cet homme.
Pas la peine de vous raconter ce qu'il va se passer, nous le savons déjà en ayant lu la quatrième de couverture. Mais quand on lit le livre et surtout à travers la verve de Jean Teulé, c'est tellement bête, puéril, idiot que nous devenons spectateur de l'innommable. Observateur impuissant mais pourtant curieux, nous ne pouvons pas ne pas continuer à lire malgré des scènes décrites à la perfection de plus en plus dure.
Un passage de l'histoire française méconnu dont j'espère ne pas garder trop longtemps les images, vite, il faut que je passe à un autre livre.

Ce qu'il me reste dans la tête :
Les images sont trop fortes et tellement ignobles, que je ne souhaite pas les mettre ici. Mais comme je suis quand même très ouverte vous trouverez ci-dessous un petit bonus.

Citations :
"Tandis qu'ils vont plus avant dans le bourg, pauvre tête en feu, de Monéys gémit :
-Ils m'ont pris pour un prussien...
-C'est parce qu'ils nient l'évidence et tentent d'exorciser la défaite à laquelle ils refusent de se résigner, analyse Dubois.
-Ces gens en te battant ont cru se porter massivement au secours de l'empereur et de la France.
-Ah, c'est ça..."

"Cette grand-mère a les mains posées sur les épaules de sa petite-fille de 8 ans qui crie et panique en découvrant le déluge de poings et de bâtons qui s'abat sue de Monéys parmi des échappées de lumière, de poussière et de brouillard. Grand-père attentif, Mathieu demande :
-Alain, allez jouer plus loin, vous faites pleurer ma petite !
-Mais c'est pas possible, ce maire... les énormités qu'il peut dire !... se désole Bouteaudon."

"-Ils ne savent pas ce qu'ils font..."

Petit bonus :
Vous trouverez un article très détaillé également sur Wikipédia.
Alain de Monéys
Rumeur de cannibalisme :  Le fantasme de paysans cannibales prend forme dans la presse, en Le Nontronnais du 20 août qui désigne sous ce qualificatif les émeutiers du foirail, relayé par les villageois des environs et les nobles dont l'oncle d'Alain de Monéys qui évoque la menace des « cannibales » dans une lettre du 22 aout 1870. La rumeur de cannibalisme prendra une forme précise lors du procès, à partir de phrases attribuées à deux des protagonistes lors des évènements. L'un des témoins, le couvreur Jean Maurel, âgé de 78 ans, affirmera avoir entendu le maire Bernard Mathieu répondre à la foule qui manifestait l'intention de faire brûler et manger la victime : « faites ce que vous voudrez, mangez-le si vous voulez ! ». Ce que le maire niera farouchement lors de la confrontation avec le témoin qui retirera ses accusations. Sur la base d'un autre témoignage, seront aussi évoqués les propos de Besse qui a regretté de voir s'écouler la graisse du corps de la victime sans pouvoir la recueillir. Lors de cette audience, deux pierres plates ayant conservé des traces de graisse seront présentées comme pièces à conviction.
Commémoration : En 1953, Noémie Lavaud, dernière personne encore vivante à avoir été témoin de l'affaire de Hautefaye, meurt à l’âge de 92 ans. Un siècle après l'affaire, le 16 août 1970, une messe de pardon est célébrée dans l'église de Hautefaye en présence des descendants de la victime et des quatre condamnés à mort. Francis Donnary, maire du village depuis 1977, propose de faire installer une stèle commémorative pour marquer l'événement, mais abandonne le projet en 2009, « car il y a encore une honte dans ce village ».

Le mot de la fin :
Ame sensible s'abstenir, violence gratuite et cannibalisme sont au rendez-vous et nous sommes des observateurs impuissants devant la cage aux lions.



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